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Post-crise agricole : l’activisme du gouvernement à J-8 du Salon de l’agriculture
Alors que des foyers de contestation essaiment ici ou là, le gouvernement tente de juguler la pression à coups de visites en exploitations et d’états des lieux des avancées du « produire et protéger » décrété par le Premier ministre le 1er février dernier.
Ce jeudi 15 février, le Premier ministre Gabriel Attal s’est rendu le matin dans une exploitation bovine de la Marne, tandis que l’après-midi, Marc Fesneau et Agnès Pannier-Runacher étaient dans les Pyrénées-Orientales, au chevet de viticulteurs de Terrats. Ceux-ci désespèrent la création de deux retenues d’eau dans les tuyaux depuis 15 ans, alors que le département bascule ostensiblement dans la semi-aridité, avec une pluviométrie de 245 mm en 2023, des températures en janvier dignes du mois de juin et des indices d’humidité des sols dignes du mois d’août.
« En 15 ans malheureusement, beaucoup de viticulteurs ont cessé leur activité et faute de perspectives, des jeunes ont jeté l’éponge, s’est désolé Guy Ferrer, adhérent de la cave coopérative les Vignobles Terrassous. Entre-temps, le coût du projet de retenue a flambé tandis que les taux de subvention ont baissé ». La quadruple peine.
« Ce projet doit faire figure d’exemple de ce qu’il ne faut plus faire », lui a répondu le ministre de l’Agriculture, qui a pris l’engagement qu’au plan procédural, le projet serait débloqué d’ici à la fin de l’année 2024, ouvrant la voie à une mise en eau un an plus tard. « On a envoyé au Conseil d’Etat un projet de décret qui vise à simplifier, à raccourcir les procédures », a asséné Marc Fesneau.
Porté par la Communauté de communes des Aspres, ce projet de retenue d’eau, qui doit permettre à 33 viticulteurs sur 350 ha de sécuriser les rendements (on parle de 25 hl/ha dans ce terroir des Aspres), et la qualité, tout offrant une réserve incendie, pourrait faire office de « crash-test » pour le gouvernement et son « grand chantier de la simplification » annoncé à Carbonne (Haute-Garonne) le 26 janvier dernier.
Ce chantier comprend notamment le passage de 4 à 2 mois des droits de recours portant notamment les procédures ICPE et les autorisations de prélèvement en eau pour les projets agricoles, la suppression d’un niveau de juridiction concernant les contentieux relatifs à la gestion de l’eau ou encore l’application de la « présomption d’urgence » pour purger le contentieux en moins de 10 mois etc.
« Dans tous les départements, les préfets se réunissent avec les représentants des agriculteurs pour simplifier, simplifier et simplifier encore, a dit Gabriel Attal dans la Marne. Plus de 900 propositions m'ont été remontées pour mettre fin à des non-sens administratifs, je les étudierai une par une. Et en 15 jours à peine, une soixantaine d'arrêtés préfectoraux ont déjà été modifiés ou abrogés pour simplifier la vie des agriculteurs ».
Alors que des foyers de contestation essaiment ici ou là, faisant craindre une reprise d’incendie, le gouvernement étale son activisme, avec en tête l’échéance sur Salon de l’agriculture, où sera présenté le Plan de souveraineté de l’élevage durable. Le projet de loi pour le renouvellement des générations sera d’ici là soumis au Conseil d’Etat. S’agissant de la simplification, il met en exergue le décret sur le curage des fossés ainsi ses avancées sur la remise en cohérence des enjeux de débroussaillement et de protection ou encore sur l’alignement des seuils d’évaluation environnementale pour les bâtiments d’élevage, deux dossiers transmis à la Commission européenne. A plan européen toujours, il met en avant ses trophées sur la reconduite de l’exemption partielle de la jachère cette année ou encore des avancées sur les nouvelles techniques génomiques NGT.
Au plan financier, le gouvernement a procédé cette semaine aux premiers versements d’indemnisation concernant la MHE et les tempêtes et inondations. Le fonds d’urgence pour la viticulture (80M€) devrait lui aussi se traduire en espèces sonnantes et trébuchantes dès la fin du mois. Le pérennisation et l’adaptation de la mesure fiscale bovine, qui sera étendue aux cotisations sociales, est aussi dans les tuyaux.
A Terrats, on mise sur le fonds hydraulique (20M€) du Plan eau pour boucler le financement des deux retenues, au coût estimé en 5 et 6 millions d’euros. « Construire un km de voirie coûte 2 millions d’euros », relativise Jérôme de Maury, maire de Sainte-Colombe-de-la-Commanderie, en charge du projet à la Communauté de communes des Aspres. « On va regarder le bouclage financier, a promis Marc Fesneau. Dans tous les projets eau que j’ai vus, ce n’est jamais le budgétaire qui butte mais les freins et les procédures ». A Terrats, on espère que la 15ème année sera la bonne. Et que la pluie finira par tomber.