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La décroissance, c’est pour la bio
[Edito] Les surfaces certifiées en bio ont reculé de 2% en 2023 et celles en conversion de 30%, rendant moribond l’objectif d’un taux de SAU bio à 18% en 2027. La Fnab attend un « sursaut », programme (non électoral) à l’appui.
La prédiction de la Fédération nationale de l’agriculture biologique (Fnab) s’est avérée exacte. Le 18 octobre 2023, devant la Commission des affaires économiques du Sénat, son président Philippe Camburet déclarait : « 2023 risque d’être l’année du recul de l’agriculture bio en France ». Les chiffres de l’Agence bio ont confirmé le pronostic. En 2023, les surfaces certifiées ont reculé de 2% et ramené le taux de SAU bio à 10,36% contre 10,50% en 2022. Le chiffre marque un premier accroc dans l’histoire de la bio, habituée ces dernières années à des taux de croissance à deux chiffres, avant que la crise inflationniste, la faiblesse de la commande publique ou encore la profusion-confusion de labels ne viennent saper la dynamique, ce à quoi il faut ajouter la communication lilliputienne. Autre chiffre inquiétant : les surfaces en conversion affichent une baisse de 30%, ce qui va mathématiquement rogner le potentiel de croissance dans les années à venir. Autant dire que l’objectif inscrit dans le Plan stratégique national (PSN) d’atteindre 18% de SAU bio en 2027 est moribond.
Le verre à moitié plein
L’Agence bio relativise la contre-performance, évoquant une année blanche plutôt que noire. Si les surfaces certifiées AB ont baissé de 2%, le nombre de fermes bio a progressé de 2%, résultat de la balance entre les entrants (7%) et les sortants (5%), ce dernier taux n’étant pas déconnecté de celui enregistré les années passées, autour de 4%. La bio reste par ailleurs un vecteur d’attractivité du métier pour 4 candidats au métier sur 10. Selon l’Agence bio, 6 entrants sur 10 optent pour la vente directe, qui se trouve être le segment de marché le plus dynamique, avec un chiffre d’affaires en hausse de 8,7%, sous l’effet des volumes et non des prix. L’Agence bio fait par ailleurs état d’une relance de la consommation de produits bio chez plusieurs de nos voisins européens, rappelant au passage que le taux d’auto-approvisionnement de la filière bio française, qui s’affranchit des engrais azotés et tourteaux importés, culmine à 83%, hors produits tropicaux.
Le vert totalement plein
Le 10 juin, l’Institut technique de l’agriculture et de l’alimentation biologiques (Itab) est venu apporter du l’eau au moulin de la bio en présentant l’actualisation de son étude sur les externalités comparées de l’AB et de l’AC (agriculture conventionnelle), basée sur près de 800 articles scientifiques. Résultats : sur les indicateurs relatifs au sol, à la biodiversité, au changement climatique ou encore à la santé humaine, y a pas photo. Par unité de surface mais aussi, le plus souvent par unité produite, l’AB l’emporte haut la main sur l’AC. A l’heure des stratégies en tous genres (SNBC-3, SNANC, Biodiversité, Ecophyto 2030...) et de la Planification écologique, un peu de cohérence et résilience dans ce brut de monde ne serait pas un luxe. Le jour même de la présentation du panorama 2023 de l’AB par l’Agence bio, le ministère de l’Agriculture a envoyé un signal, en annonçant une rallonge de 15 millions d’euros destinée à couvrir l’intégralité des demandes du fonds d’urgence. Une mise en bouche, espère la Fnab, qui attend un « sursaut » du soutien au développement de la bio, programme (non électoral) à l’appui.