Changement climatique : étalage et recyclage en guise de Plan d’adaptation

Le 3ème Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC-3) fait son marché dans la myriade de politiques publiques, de la Pac au Plan eau en passant par la toute fraiche loi d’orientation agricole, sans impulser une véritable disruption individuelle et collective qu’impose la brutalité du changement climatique.

Réaliser un diagnostic modulaire pour évaluer la vulnérabilité des exploitations au moment de l’installation et de la transmission : telle la première des 29 actions listées dans la mesure 37 (sur un total de 52 tous secteurs confondus) du 3ème Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC-3) dévoilé lundi par le ministère de la Transition écologique. La mesure en question figure à l’article 9 de la loi d’orientation pour la souveraineté agricole et le renouvellement des générations en agriculture, adoptée le 20 février dernier et en cours d’examen au Conseil constitutionnel. Elle est triplement emblématique de la faiblesse du volet agricole du PNACC.

Premièrement parce que les futurs diagnostics modulaires en question seront réalisés « à la demande des agriculteurs et ne peuvent leur être imposés ni restreindre le bénéfice de certaines aides publiques », comme le stipule l’article 9 de la future loi. Deuxièmement parce qu’ils ciblent les nouveaux installés, soit bon an mal 14.000 exploitations, laissant sur le carreau 96% des exploitations. Troisièmement parce qu’elle figure en tête des actions du volet agricole du PNACC, sauf à considérer que le classement des 29 actions est dénué de toute hiérarchisation des enjeux et des priorités. Pour information, l’action 29 est la suivante : « un volet eau de France 2030 couvrira l'ensemble de la chaine de valeur et des usages liés à l'eau (gestion de la ressource brute, usages de l'eau, maîtrise de la donnée et de son analyse, traitement des eaux), comme soutien transversal aux innovations des entreprises françaises ».

De l’étalage et du recyclage des politiques publiques

Entre les actions 1 et 29, la mesure 37 du PNACC fait étalage de politiques publiques, faisant son marché dans la myriade de plans et stratégies tels que que le Varenne de l’eau et changement climatique (où sont les plans d’adaptation par filière et par territoire ?), le Plan eau (qui fait davantage provision de contentieux que de stockage d’eau), le Programme ambition bio (avec l’Agence bio un temps sur le billot), le Pacte pour la haie (amputé de plus de 50% de son budget) ou encore le Pacte d’orientation pour le renouvellement des générations en agriculture, étonnement ressuscité alors qu’il n’a aucune traduction concrète sauf à avoir très vaguement inspiré la loi d’orientation agricole.

Le volet agricole du PNACC met en avant la réforme de l’assurance récolte, qui ne satisfait ni les éleveurs ni les viticulteurs, les premiers contestant l’outil satellitaire, les seconds désespérant une réforme de la moyenne olympique.

On n’oublie pas la Pac, mère de toutes les politiques publiques et de bien des batailles, et forcément mobilisée par le PNACC dès l’action 2, consistant à « évaluer et réviser le Plan stratégique national 2023-2027 pour mieux prendre en compte les enjeux d’adaptation au changement climatique ». Quand on connait les résistances à l’œuvre lors des négociations de chaque programmation quinquennale, on souhaite bon courage aux pouvoirs publics pour tenter de faire bouger une ligne à l’occasion du processus de révision à mi-parcours.

Toujours au menu de l’action 37 du PNACC, on notera la prise en compte des nouveaux risques sanitaires induits par le changement climatique vis-à-vis des animaux avec les maladies émergentes type FCO et MHE et l’irruption sinon l’exacerbation de nouveaux parasites et de nouvelles maladies en productions végétales. Le bien-être des animaux (ombrage, accès extérieur) est également pris en compte, ainsi que celui des travailleurs (mesure 11 du PNACC) tandis que la mesure 36 s’enquiert du développement des connaissances, de la formation et de l’anticipation des conséquences du changement climatique dans le secteur agricole et l’industrie agroalimentaire. Elle recycle par ailleurs le Plan semences et plants pour une agriculture durable 2, datant de 2021, et sans budget propre.

Un double manquement à l’échelon individuel et collectif

Alors, qu’aurait-on aimé voir écrit en ouverture du volet agricole du 3ème PNACC ? Premièrement : la massification des diagnostics individualisés ClimaTerra consistant à accompagner les agriculteurs dans la transformation de leur exploitation pour gagner en résilience tout en réduisant leurs émissions de gaz à effet de serre. Hélas, les Chambres d’agriculture ne disposent ni des moyens financiers ni des moyens humains pour dépasser le stade d’une expérience de laboratoire et de la frappe chirurgicale. Deuxièmement : la finalisation expresse des plans d’adaptation des filières et des territoires, de nature à articuler ce que les agriculteurs et les territoires seront capables de produire avec ce que les acteurs économiques seront capables de soutenir, de transformer et de vendre, dans une France à +4°C à horizon 2100. En résumé : du structurel pur et dur.

Avec une température moyenne de 14,0°C et une anomalie de +1,0°C par rapport à la normale 1991-2020, l'année 2024 s’est classée parmi les cinq années les plus chaudes depuis le début des mesures en 1900 selon Météo-France.